bernard thibault a manifeste au puy en velay jeudi matin contre la loi travail photo alexandre pauze 1473967408

Presse : Le Progrès, 16/09/16

Jeudi matin, si les cégétistes de Haute-Loire battaient le pavé, l’après-midi, ils ont participé à l’assemblée générale de l’union départementale de leur syndicat. Avec en invité d’honneur, Bernard Thibault, l’ancien secrétaire général de la CGT, venu, notamment pour présenter son livre : La Troisième Guerre mondiale est sociale.

Connaissiez-vous le département de Haute-Loire avant d’y venir pour cette assemblée générale ?

« Oui. J’y suis venu à de nombreuses reprises notamment quand j’étais secrétaire général de la CGT (entre 1999 et 2013, NDLR). Je me souviens particulièrement d’une visite en 2004 pour accueillir plusieurs centaines d’anciens militants CFDT, en désaccord avec les instances de leur syndicat, qui avait décidé de rejoindre la CGT de Haute-Loire. »

Dans un département rural comme la Haute-Loire, face à quelles problématiques la CGT est-elle particulièrement vigilante ?

« Les problèmes dans l’industrie, tout d’abord. Car, même si une région n’est pas touchée par un plan social de grande envergure, ça ne veut pas dire que l’industrie se porte bien. L’autre motif d’inquiétude, ce sont les services publics. Dans les zones rurales, leur situation est dramatique alors qu’ils participent à la cohésion sociale. »

Que vous inspire la mobilisation relativement importante au Puy-en-Velay contre la loi Travail alors que la loi est votée ?

« Qu’il faut continuer ! Il y aura d’autres rendez-vous contre ce texte, peut-être sous d’autres formes. Il faudra suivre sa mise en œuvre à tous les niveaux et, notamment, dans les entreprises. Et puis, on doit avoir en mémoire, la phrase de Jacques Chirac à propos du CPE : “La loi est promulguée mais ne sera jamais mise en œuvre.” La loi Travail peut être dans la même lignée. De plus, le salut peut venir du Droit international du travail avec lequel plusieurs dispositions de la loi El Khomri sont en infraction. Par exemple, sur le recours au référendum d’entreprise ou sur la décentralisation du droit. »

C’est au niveau international que se défend le droit du travail aujourd’hui ?

« Oui. Au sein de l’OIT (Organisation internationale du travail) dont je suis membre depuis 2014, je propose des sanctions contre les pays en infraction à l’égard des traités internationaux au niveau des droits des salariés. Il y a 500 000 multinationales dans le monde qui font travailler un salarié sur cinq. Même dans une PME, on est souvent soumis aux commandes de grands groupes. Cela concerne tout le monde. L’objectif serait de faire de l’OIT un contrepoids à l’Organisation mondiale du commerce qui peut sanctionner les États dont les pratiques commerciales ne sont pas conformes. »

Votre ouvrage paru au printemps s’intitule : La Troisième Guerre mondiale est sociale. Le mot guerre est un terme fort…

« Oui mais il est révélateur du nombre de victimes du travail dans le monde. 2,3 millions de personnes décèdent dans l’exercice de leur travail, chaque année. C’est plus que dans toutes les guerres sur la planète. Le cas du Rana Plaza, au Bangladesh, où plus de 1 100 personnes sont mortes dans l’effondrement d’un atelier de confection, en 2013, en est un terrible exemple. Donc, oui, le travail est facteur de drame humain. »

Propos recueillis par Alexandre Pauze